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« Deux chouettes et un mobil home s’en vont par les chemins. Ils croisent au bout de quelques kilomètres une radio qui leur demande comment ça va. Tout le monde a l’air de bien aller, à roues. »
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Deux hommes sont aussi présents. Ils sont en noir et blanc. Ils ont l’air intelligents et regardent on ne sait quoi. Ils brillent quand les chouettes sont mates. Ils l’ont rejointe place Pigalle, dans un bar ou 2 vodkas green sont tombées. Ce soir le serveur a été un coup d’une nuit, mais aujourd’hui il n’est pas assez présent pour oublier les journées passées à travailler dans la télé-réalité. La discussion n’a pas de sens : on croit être 3 alors qu’on est 2, on croit être 2 alors qu’on est 3.
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En fait c’est une erreur de croire que l’art existe grâce à l’humain, grâce à l‘artiste. L’art existe tout seul grâce à la réalité. C’est un jeu de différence entre les objets qui fait que nous distinguons une voiture d’un verre d’alcool. L’un ne peut exister sans l’autre. Nous comparons les formes, les couleurs, les textures en permanence pour identifier ce qui nous entoure, et y apposer un langage. Ainsi l’œuvre d’art n’existe qu’à cause de la présence de la voiture ou du verre d’eau. Et elle apparait uniquement en se différenciant, inclassable, des autres objets. L’œuvre d’art est un mode d’être.
Série esquimau
Il a pourtant l’air bien sympa. Il a un truc vraiment exotique/sympa. Et c’est pour ça que moi, l’homme recouvert de noir, je dépense tout mon fric. Je luis donnerais tout ce que je possède les yeux fermés, tant que je peux le prendre en photo, avec son air exotique/sympa, et mettre les photos dans des beaux cadres.
Mon studio paie pas de mine en fait. La déco est même un peu pourrie. Des tonnes de vieux trucs partout. Mais quand il est là pour que je le prenne en photo, je me dis que vraiment, mon environnement se transforme et s’illumine grâce à son air sympa. Il est radieux, il irrigue la déco de sa lumière intérieure, et pour ça je dépenserais tout mon fric. Pour lui j’en ai beaucoup, j’en ai toujours plein. C’est tellement important de pouvoir photographier quelqu’un qui a l’air sympa. Ca fait de belles images à mettre dans de beaux cadres.
En fait la déco pourrie et mon studio qui ne ressemble à rien ont besoin de lui, ça vaut tout l’or du monde. Il est chaleur et lumière, il est l’image-même de la sympathie.
Et puis son coté exotique me plaît aussi. Il faut bien se rappeler que, quand on est un homme recouvert de noir et qu’on a un peu de fric, on a toujours besoin de quelqu’un avec un air exotique. Alors si en plus il a l’air sympa, et qu’on peut le prendre en photo, c’est carrément super.
Et aussi il regarde toujours je ne sais quoi, surement la déco pourrie du studio. On dirait qu’elle le fait rire. C’est tant mieux, ça fait des photos encore plus belles, irradiées de sympathie.
©2012, pour le catalogue Anne Bossuroy, Galerie Alice Day, Bruxelles
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